Cette
couleur, certainement fort ancienne, a été remarquée depuis plus d’un siècle
Et c’est évidemment des chats persans (les
seuls sélectionnés à l’époque, il faut le dire) qui la portaient. On disait
alors qu’ils étaient issus d’accouplements de hasard entre des persans bleus,
noirs et blancs, ce qui est, d’un point de vue génétique, impossible. Mais à
l’époque, la génétique ne réglait pas encore la vie des chats et surtout
l’interprétation des couleurs n’était pas aussi précise et pointilleuse
qu’aujourd’hui.
On peut néanmoins en reconnaître la beauté.
Harrison Weir, que l’on considère comme le père de la félinotechnie, décrivait
ainsi le premier persan smoke qu’il avait eu le plaisir de découvrir à
l’exposition de Brighton en 1872 : " Une beauté fut exposée à Brighton,
écrivait-il dans " Our cats ", de couleur blanche aux extrémités noires, le
blanc étant à peine visible, sauf si l’on écartait les poils ; cette teinte
avait un effet merveilleux. "
Il ne fut pas le seul à tomber sous son
charme. Vingt ans après, cette variété avait droit à sa propre catégorie dans
les expositions britanniques et, en 1900, le premier club de la race, la
" Société des persans argent de fumés " naissait. Elle sera rebaptisée un peu
plus tard " Société des chinchillas, tabby argent et fumés ". Un étalon s’est
particulièrement fait remarquer dans ces années de début de siècle, aussi bien
pour ses qualités esthétiques que reproductrices, le Champion Backwelle Jogram
qui appartenait à Mrs H.V. James. A cette époque, le stud book anglais (le
livre des origines) totalisait une trentaine de persans smoke, mâles et
femelles.
Les photos du fameux Backwell Jogram
représentaient un type de persan bien éloigné du courant actuel et même pas
encore proche du type dit " ancien " que la plupart des amateurs n’ont pas
oublié, c’est-à-dire avec un petit nez. Non seulement Jogram avait le nez
carrément long mais ses oreilles pointaient comme celles d’un norvégien !
Par ailleurs, les yeux des premiers persans
smoke ne possédaient pas cette belle et chaude teinte cuivrée qui illuminent
le masque des sujets actuels. Ils étaient plutôt verdâtres. Mais il faut bien
un début à tout.

Le persan smoke n’est pas une race à part
entière, c’est une variété de persan, c’est-à-dire une couleur à l’intérieur
de la race, comme le sont par exemple le chinchilla, le colourpoint,
l’unicolore ou le tabby.
La couleur smoke n’est pas l’apanage de la
race persane. On la constate dans une quantité de races dont les standards ont
plusieurs coloris : il existe bien sûr des exotic shorthair smoke mais aussi
des angoras turcs smoke, des british shorthair smoke, des rex smoke et encore
des chats de maison, ou gouttières, smoke.

Après de longues années noires dues à la
Seconde guerre mondiale, il ne restait pratiquement plus de persans smoke.
L’immigration de certains d’entre eux aux
U.S.A. a néanmoins permis aux éleveurs britanniques de reconstituer leur
cheptel et la sélection de cette variété s’est étendue à l’Europe. La Hollande
est reconnue pour avoir été un des pays moteurs du persan smoke. Et c’est de
ce pays que venait un des premiers smoke à avoir défrayé la chronique en
France dans les années 80, le fameux Nicky Van Belsiltina appartenant à Dany
Verburgh. Les éleveurs hollandais font également figure de pionniers en ce qui
concerne les variétés pastel comme le red et le crème smoke. Cependant, que ce
soit en France où le nombre de sujets a bien progressé et dans des coloris
variés ou ailleurs, le persan smoke n’a pas encore réussi à coiffer au poteau
les autres variétés.
Une raison principale à cela : le smoke n’est
pas le chat rêvé pour les fanatiques du podium ou du moins ne peut-il l’être
que durant trois mois de l’année.
Explication : pour faire valoir la beauté de
son contraste, ce chat a besoin d’être au maximum de sa fourrure. Dès que la
mue s’amorce, dès que la longueur du poil faiblit, cela se répercute sur le
contraste et c’est loupé pour le podium. Au mieux, fera-t-il son titre. A côté
d’un smoke, un persan unicolore (self) a bien plus de chances : les juges
seront plus tolérants pour une fourrure plus pauvre qu’à l’ordinaire si le
type est excellent.
Deuxième raison : du fait qu’il n’est pas un
habitué des podiums, le persan smoke a un peu moins la cote.
Moins d’éleveurs cela signifie moins de
production et davantage de difficultés pour travailler à améliorer le type.
Cependant, il ne faut pas généraliser, il
existe à l’heure actuelle des persans smoke qui n’ont rien à envier aux
meilleurs sujets des autres variétés et qui remportent haut la main des best
in show. Enfin, autant les variétés black smoke et tortie smoke sont
spectaculaires et tapent à l’oeil du public, autant il faut un regard expert
pour apprécier la subtilité du contraste dans les teintes pastel comme le bleu
crème smoke, le bleu smoke et le lilas smoke.
Ce sont là davantage des coloris qui
attireront les éleveurs, les juges et certains amateurs avertis ou en
puissance de s’investir dans l’élevage.

Mais au fait, d’où vient cette coloration
particulière du poil qui n’est présente que sur une partie du poil ?
Elle a pour origine la présence d’un gène l
le gène I, pour inhibiteur.
Ce gène agit sur le poil des chats smoke en
supprimant une partie de la couleur (soit noir, bleu, roux, etc...) sur
environ 50 à 80 % de sa longueur. Cette partie décolorée apparaît alors blanc
argent. Ce même gène agit également sur le poil des chats tabby où il décolore
la partie jaune du poil en blanc argent. On a alors des silver tabby qui
peuvent être black silver tabby, blue silver tabby, écaille silver tabby,
etc...
Notons que ce gêne est dominant, à savoir que
pour obtenir des sujets smoke (ou silver), il importe qu’un des parents le
soit. Deux noirs self (unicolores) ne donneront jamais de smoke ou de silver
même s’ils sont eux-mêmes issus de smoke ou de silver. Les éleveurs de persans
smoke et silver tabby tirent partie de cette communauté de gênes pour les
marier ensemble : ils ont alors la possibilité d’obtenir des chatons smoke ou
silver dans une proportion variable.
Il fut un temps où ce type de mariage était
contre-indiqué sous prétexte qu’il apportait des marques " fantômes " sur les
robes des chatons smoke. Mais, dès que ceux-ci grandissent, leurs éventuelles
marques s’estompent pour disparaître définitivement.
En revanche, si elles subsistent à l’âge
adulte, on peut douter de la qualité de la robe (on constate le même phénomène
chez les jeunes chartreux, race dans laquelle les sujets tabby n’interviennent
pourtant jamais !).
Certains éleveurs optent pour les mariages
entre sujets smoke et unicolores (self) ou encore uniquement entre sujets
smoke.

Sachant qu’il faut du temps pour apprécier à
sa juste valeur une robe smoke, comment les éleveurs savent-ils que tel ou tel
chaton est smoke ?
Cela se voit-il à la naissance ?
Il est évident que si l’on a marié smoke et
smoke, tous les chatons le seront. En revanche, en cas de mariages avec un
silver tabby ou tout autre tabby ou avec un chat unicolore, il faut une bonne
expérience pour dénicher les smoke. Les bébés smoke ont à leur naissance comme
des lunettes qui éclaircissent le poil autour des yeux.
" Néanmoins, il faut parfois patienter
jusqu’à 8/9 mois pour être certain de la couleur.
Souvent, la fourrure des chatons est inversée
: ils sont foncés à la racine et argentés à l’extrémité, ce qui peut créer un
doute. "
Certains spécialistes disent que le contraste
s’affirme après la deuxième mue.
Le persan smoke s’autorise tous les coloris
de l’unicolore : il existe donc en noir, en bleu, en roux, en crème, en lilas,
en chocolat et en écaille (écaille noir, écaille bleu ou bleu crème, écaille
chocolat, etc.) Dans toutes ces couleurs, les yeux sont orange à cuivre. Le
gène inhibiteur I affecte tous les poils (tous ont donc une base argentée)
mais le contraste sera d’autant plus visible que le poil est long.
Sur la face où le poil est court, il est à
peine visible parfois. Il est beaucoup plus évident sur le corps et la queue
qui, lorsque le chat se déplace, laissent apparaître un jupon de satin blanc.
Il est très net sur la collerette qui est
carrément argentée et donc nettement plus claire que le reste du corps.
Flashant chez le smoke noir, troublant chez
un crème smoke.
Pour le reste, morphologie, gabarit, type, le
persan smoke se conforme en tous points au standard général du persan. Il a
donc, comme tous ceux de sa race, un corps lourd et trapu, une poitrine large,
des épaules et un dos massifs et bien musclés.
Il est bas sur des pattes fortement
charpentées. Sa queue n’est pas très longue mais proportionnée au corps et
bien touffue et son extrémité est légèrement arrondie. Sa tête est ronde,
ample et majestueuse, le crâne étant large et le front bombé. Son nez doit
aujourd’hui être très court, large et placé entre les deux yeux. Il présente
un trop profond et des narines bien ouvertes. Ses petites oreilles sont
placées bas et bien espacées l’une de l’autre, et leur extrémité est arrondie.
Ses mâchoires sont larges et puissantes, son menton ferme.
Le persan smoke doit avoir de grands yeux
bien ronds, suffisamment espacés l’un de l’autre.
Enfin, l’expression poupine " sweet look " -
recherchée depuis quelques années pour l’ensemble des variétés persanes, le
concerne évidemment. Plus de grimace, place à la physionomie douce et
avenante.
Atout numéro 1 de la race persane, la
fourrure du smoke doit en avoir l’ampleur et la longueur. L’intérieur des
oreilles est bien poilu et il y a des touffes de poils entre les doigts.
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